Pourquoi devenir famille d’accueil ?

Entretien avec Véronique et Thierry Hack, famille d’accueil à JUZIERS.
Dès que l’on entre dans la maison de Véronique et Thierry, dans la grande pièce, on se retrouve au milieu des jouets, des livres et des activités pour les enfants. Nul doute que nous sommes dans une maison à laquelle ils appartiennent vraiment. Mais comment devenir famille d’accueil ? Qu’est-ce qui peut motiver ce choix ? Vous vous posez probablement de nombreuses autres questions sur ce métier, c’est pour y répondre que nous les avons rencontrées, Véronique Family Assistant et Thierry, son mari qui forment ce qu’on appelle « une famille d’accueil ».
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Bonjour Véronique et Thierry, merci de nous recevoir. Être une famille d’accueil reste un grand mystère pour beaucoup de nos lecteurs, qu’est-ce qui vous a poussé à faire ce choix ?
Véronique (V) : J’ai arrêté mon à la naissance de notre troisième enfant depuis trois ans, j’ai profité de mon statut de mère au foyer puis, tout naturellement, vu la forte demande du moment, je me suis tournée vers le métier de « nounou agréée », nous les appelons maintenant assistante maternelle. Parler avec une amie en fin d’école qui était elle-même accompagnée de petits, m’a expliqué qu’elle était assistante familiale et qu’elle faisait « l’observation de la petite enfance » c’est-à-dire un travail sur la relation « parents-enfants » sur une courte période de 3 mois renouvelable. Avec Thierry, mon mari, nous avons discuté de ce choix qui était important pour moi et comme il était tout à fait d’accord, nous avons pris les mesures nécessaires pour devenir une famille d’accueil.
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En quoi consiste exactement ce travail ? Par qui vous sont-ils confiés ?
V : L’association pour la protection de l’enfance et de l’adolescence des Yvelines pour laquelle je travaille est mandatée par l’ASE (Child Welfare). Les enfants sont placés par décision du juge des mineurs ou par une décision administrative pour diverses raisons et nous sont confiés pour une période déterminée renouvelable tous les ans ou tous les deux ans en coordination avec une équipe éducative et/ou multidisciplinaire.
C’est un engagement très fort, quelles sont les qualités nécessaires pour que cet accueil se fasse dans les meilleures conditions ?
V : Je pense que de nombreuses qualités humaines sont nécessaires Observations, pédagogie, disponibilité, capacité de dialogue, sens de l’écoute, empathie, compréhension et explication « les mots et le mal », mais aussi rigueur et cadre : que les enfants peuvent très souvent mettre en danger et venir vérifier constamment. À mon avis, toutes ces qualités sont essentielles pour permettre aux enfants de se reconstruire et/ou de se construire dans un environnement sûr. Il s’agit d’un engagement personnel et professionnel.
Si nous comprenons bien, les enfants sont-ils toujours sous l’autorité de leurs parents ?
V : Lorsque l’enfant est admis dans notre association, un projet est mis en place avec l’ASE et les parents afin que ceux-ci, soutenus par différents acteurs, puissent reprendre confiance en eux tout d’abord et donc en leur rôle de parents. Oui, bien entendu, il ne s’agit pas de remplacer complètement ces parents, mais de les accompagner pour assurer la vie quotidienne et les besoins de leur enfant. Il est important de travailler en accord avec eux, il est évident que nous travaillons tout au long de cette prise en charge pour un retour dans la famille lorsque cela est possible. Nous accueillons les enfants à cette fin. Dans certains cas, les parents ont un droit d’accès médiatisé dans un lieu neutre, notre foyer demeurant le lieu privilégié de l’enfant. Où il grandit et se permet également d’exprimer son malaise.
Quelles étapes ? et combien de temps faut-il pour obtenir le statut d’assistant familial ?
Thierry (T) : En effet, avant d’accueillir le premier enfant, une enquête a été réalisée auprès de notre famille, nous avons également eu plusieurs entretiens avec des professionnels.
Véronique (V) : Afin d’obtenir mon statut, j’ai d’abord contacté le PMI, récemment nous avons une unité d’accréditation pour l’AF (constitution du dossier, entretien psychologue, assistante sociale, garderie ainsi qu’une visite à notre domicile avec une grille de sécurité du logement spécifique).
Après avoir reçu notre accréditation, nous devons rechercher un employeur. Lors de la signature de notre contrat de travail, nous devons effectuer une formation de 60 heures avant notre première réception, puis pendant les deux premières années de travail, nous effectuons une formation obligatoire de 240h (étalée sur deux ans), à la suite de cette formation, un diplôme (DEAF) peut être obtenu.
Quel âge ont les enfants que vous accueillez ?
V : Lors de la demande d’approbation, nous avons le choix sur l’âge des enfants que nous souhaitons accueillir (0-21 ans) pour ma part, j’ai pris en compte l’âge de la mienne parce que, évidemment, nous engageons toute notre famille dans « cette aventure ».
Il arrive probablement que vous rencontriez des difficultés avec ces jeunes, comment ça se passe ?
V : Bien entendu, ces enfants ne sont pas différents des autres et nous prenons en compte les difficultés qu’ils ont rencontrées dans le passé, il faut beaucoup de patience pour qu’ils trouvent un certain équilibre. Les situations proposées ainsi que les pathologies de l’enfant sont de plus en plus complexes (troubles du comportement, handicap, inceste, violence). Heureusement, dans tous les cas, nous ne travaillons pas seuls. Comme je vous l’ai dit, je travaille pour une association, cela nous permet d’être en contact avec toute une équipe de professionnels : référent pédagogique, psychologue, etc.
Vos enfants étaient encore jeunes lorsque vous étiez une famille d’accueil pour la première fois, est-ce que cela s’est bien passé ?
T : Oui, en effet, notre dernière fille n’avait que 4 ans quand j’ai commencé ce travail, mais elle ça s’est plutôt bien passé. Vous savez, même si les enfants accueillis ne sont pas les nôtres, ils partagent notre vie quotidienne, nous avons les mêmes exigences d’eux, en tenant compte bien sûr de leurs expériences, des valeurs que nous leur enseignons sont celles que nous avons inculquées à nos enfants. Je ne sais pas si ce sont ces valeurs qui ont poussé deux de mes filles à travailler dans le domaine social, l’une est assistante à la garde d’enfants et l’autre une éducatrice de la petite enfance chance ?
Combien d’enfants avez-vous accueillis chez JUZIERS ? Comment t’appellent-ils ?
V : Depuis la fin de 1997, date de mes deux premières visites, nous avons accueilli une trentaine d’enfants, dont 17 très jeunes (dans le contexte de la petite enfance), c’est aussi l’une des raisons qui m’ont fait choisir ce métier, j’ai toujours eu besoin d’être entouré de petits. Je prends beaucoup de plaisir à les observer, à les voir grandir, même si ce n’est pas toujours facile. À chaque nouvelle réception, je ressens une sorte d’excitation et angoisse en même temps, c’est sans doute le moment de la nouvelle rencontre, d’un nouveau départ avec un être différent que nous devrons parcourir un long chemin… C’est ce qui me motive à continuer…
Pour répondre à la deuxième partie de ta question, les enfants nous appellent tous « Oncle » et « Tante », ils ont choisi ce surnom qui leur semble plus facile à prononcer pour que les nouveaux venus continuent.
Vous avez ces enfants, trois en ce moment, 24 heures sur 24, ça doit être très occupé, avez-vous des moments de repos ?
V : Et sept jours par semaine ! Cela demande donc en fait de nombreux investissements, beaucoup d’énergie et une grande disponibilité. Vous devez vous occuper de la vie quotidienne, des devoirs, des différentes réunions de travail, faire le lien avec l’école, les accompagner lors de divers déplacements, des rendez-vous pour les soins (Psych, CMPI, CMPP, PMI, orthophoniste…) mais aussi des activités extrascolaires (sport, musique…). Nous avons des congés comme tous les employés, ils sont imposés nous sans enfants. C’est bon pour tout le monde ainsi que le plaisir de se retrouver à notre retour. Les enfants selon leur âge ont la possibilité d’aller au camp sinon nous sommes en famille relais pendant les vacances des collègues, les enfants expérimentent comment ça se passe ailleurs.
Merci beaucoup Véronique et Thierry, au-delà de toutes ces informations qu’ils ont pu trouver à travers cet entretien, je pense que nos lecteurs ont pu ressentir le bonheur et le plaisir que vous avez d’accueillir ces enfants qui ont tant besoin de soutien, félicitations pour toute l’affection que vous leur portez et qu’ils ont besoin de tant de choses.
Si ce témoignage suscite des vocations, l’Association pour la protection des enfants des Yvelines Adolescence recrute des aides familiales de façon permanente. Vous pouvez, après avoir fait une demande d’accréditation, soumettre votre demande.
Interview réalisée par Geneviève Forget et Jannick Denouël dans Les Echos de Meulan »